Il est loin le temps où les premiers Social Media Gurus hexagonaux prêchaient seuls dans le désert : en quelques années, leur travail et celui de centaines d’autres ont fait émerger une véritable discipline. Le fruit d’erreurs et de succès.
Toutefois, d’aucun, dans le Landerneau social media, commencent à se plaindre d’une certaine routine: nous utiliserions toujours les mêmes mécaniques, les mêmes dispositifs, les mêmes veines créatives. Facebook deviendrait obligatoire, l’absence sur Twitter suspecte , le manque de bloggeurs « sanitaires » honteux…
Le règne de l’OnLike System
L’apparition de ce discours peut signifier deux choses au moins : soit effectivement nous tournons en rond et les annonceurs se conforment à ce comportement moutonnier, ce que je ne crois pas tant les usages sont mouvants en ce moment, soit c’est simplement une forme d’expression connexe de l’installation de certaines « best practices », ce qui contrarie inévitablement les tenants d’un certain Web.
Mais il existe une troisième voie pour répondre à ce discours. D’abord, concédons qu’actuellement en France nous vivons sous l’empire de l’Onlike System, contraction traduisant le règne du Graph social Facebook en ligne : toutes les surfaces Web ont adopté cette couche, au point qu’on le trouve parfois même sur chaque post d’un fil de discussion de forum…
Cela pose une question : le Like et, avec lui, une large frange des campagnes social media, vont elles rester strictement digitales ? Alors, oui, on pourra parler des « bloggers events » qui sont souvent IRL, mais dans ce cas, l’utilisation de la réalité puis du Web sont successives, pas simultanées. En dehors de cette pratique, on ne trouve pas beaucoup de traductions concrètes de l’alliance IRL/URL.
Et pourtant, un faisceau de présomptions laisse indiquer que la prochaine destination du social media digital est le monde réel. J’en distingue clairement quatre, au moins :
Emotion is Queen
Sincèrement , aujourd’hui, une campagne SMM, c’est quand même et surtout créer une émotion au travers d’un contenu web relativement authentique et utiliser les leviers digitaux des différentes plateformes pour faire en sorte que cette émotion se propage, se réplique . Et qu’elle génère une connivence avec la marque, une forme de reconnaissance pour le bon moment passé.
Dans ce schéma, en quoi le Web possèderait il le monopole du déclenchement de l’émotion en question ? Certes, il est probable qu’il n’existe pas à date de meilleur outil pour partager cette émotion, mais son déclenchement est loin d’être d’une exclusivité digitale. La Google Gen devra s’en rappeler.
D’ailleurs, il semble curieux de n’assister à aucun rapprochement entre des agences spécialisées dans le Social Marketing et d’autres dans le OOH (Out of Home) qui inclut le Street Marketing, les évènements outdoor et compagnie, à l’exception d’une agence parisienne. Mais quelque chose me dit que les grandes manœuvres commencent.
Pourtant, le cercle vertueux est clair : un dispositif In Real Life qui génère un contenu digital ou une mention en mesure de naviguer sur les surfaces sociales comme Facebook ou Twitter, et d’y déclencher conversations et attachements. C’est décupler l’impact d’un métier (le OOH) tout en en nourrissant un autre (le SoMe).
Sans rentrer dans le débat de la force comparée d’une émotion générée par un objet digital ou par un stimulus IRL, on a tout de même chacun son avis sur la question ! On tombe quand même vraiment amoureux de quelqu’un après l’avoir vu IRL, non ?
De brillantes tentatives d’agences et d’annonceurs
Si l’on ne devait citer qu’un seul exemple de campagne IRL/URL, on pourrait choisir l’exemple du Coca Cola Village. Chaque année, la marque convie 10 000 jeunes gens dans un village de vacances spécifiquement conçu pour eux. L’an dernier, l’intégralité des attractions et divertissements du village a été recouverte de boutons « Like » et d’une puce RFID. Parallèlement, chaque vacancier a reçu un bracelet RFID contenant les login et mot de passe de son compte Facebook. La suite est simple : à chaque fois que l’un d’entre eux appréciait un toboggan ou une grande roue, il pouvait immédiatement le partager sur son mur Facebook. Alors, bien entendu, on ne va pas tous porter des bracelets dans ce genre, mais les capacités des applications des Smartphones Androïd et Apple permettent d’envisager une intégration immédiate d’un dispositif comparable.
Pourquoi donc les rayons de tous les Zara, Uniqlo ou H&M ne sont ils pas recouverts de ce genre de boutons Like? Qu’attendent les marques ? Ou les agences pour le leur proposer massivement ? Cela fournirait aux community managers et aux créatifs un matériau fabuleux pour animer leur marque en ligne.
La social géolocalisation
L’arrivée de Places, le module de géolocalisation de Facebook, a clairement accéléré l’usage du « Check In » qui consiste à déclarer sur la Toile où l’on se trouve et par voie de conséquence avec qui, si vos amis ont le même usage.
En trois mois, le service aura atteint une notoriété supérieure à celle de Foursquare, Gowalla ou Plyce. La riposte médiatique de Foursquare n’a pas manqué de panache, mais le débat ne porte plus désormais que sur l’honneur : ces services mourront face à l’ogre aux 500 millions de membres dont une proportion toujours plus importante utilise le service en situation de mobilité.
Mais plus que Places, c’est Deals qui va permettre aux marques de gérer le marketing et plus spécifiquement le programme relationnel de la zone de chalandise de chacun de leur point de vente. Ainsi, concrètement, dans peu de temps, nous serons prévenus par notification que le McDo d’en bas fait 20% sur ces burgers de la veille.
La réalité augmentée
Cette technologie mérite très certainement le prix « Arlésienne 2010 ». Très médiatique dès 2008, la réalité augmentée n’a pour l’instant, à l’exception de rares expériences comme celle de Lego, pas dépassé le stade des applications « Monuments historiques » ou « Metro parisien ». Concédons que Nike City fut une très belle expérience mais qui n’a finalement pas rencontré un succès de masse dans les quelques grandes villes mondiales concernées.
Le potentiel, pourtant, est gigantesque.
La grande réconciliation entre les agences digitales et le reste du métier?
Peut-être n’est-on pas arrivé au bout du cycle d’évangélisation des marques. Peut être qu’on ne peut pas aller aussi vite et, sans cesse, les déstabiliser avec de nouveaux paramètres. Peut-être aussi qu’il faut rentabiliser des années d’investissement avant que ne soit récemment reconnue la valeur du levier Social Media. Peut-être enfin qu’épuisés par nos milliers de slides, de posts et de tweets, les annonceurs et nous-mêmes nous appuyons sur des valeurs sures et n’osons pas sortir de la surface que nous commençons à peine à maîtriser.
Il y a pourtant derrière ce frein des trésors de créativité, des opérations fabuleuses à imaginer et, au loin, la grande réconciliation entre les agences digitales et le reste du métier de la communication. Non ? Non, je déconne !