Etude de cas : Comment reprendre le contrôle de son E-reputation

Le contexte

Début 2012, la société Securitas Direct, leader européen de la télésurveillance, est encore peu présente sur le web et ses seules prises de parole se résument à des communiqués de presse diffusés en ligne. Pourtant, ses clients, prospects et voir même concurrents sont présents et de plus en plus actifs sur les forums, blogs et réseaux sociaux, postant des messages portant souvent atteinte à  son e-réputation.  En première page de Google des liens renvoient vers des avis négatifs postés sur des forums à fort trafic.

A une période de son histoire où l’entreprise a considérablement augmenté sa qualité de service, l’attractivité de ses produits et la taille de son portefeuille client, Securitas Direct n’a plus le choix et doit agir.

Nous allons voir comment ils ont procédé pour reprendre le contrôle de leur e-réputation.

Les Objectifs 

  • Établir le dialogue avec les internautes et se montrer présent sur le web
  • Mettre en place une veille pour être informé et pouvoir réagir dès la publication de nouveaux posts et commentaires à leur sujet
  • Mettre en place une stratégie de contenu et essayer de rendre les contenus officiels de la société plus proéminents dans les résultats de Google
  • Faire supprimer certains messages obsolètes, diffamatoires ou dénigrants.

Les solutions mises en place

1.    Recrutement d’un Community Manager

La direction marketing a commencé par recruter un Community Manager pour mettre en place une vraie stratégie de présence sur les réseaux sociaux et le web et établir le dialogue avec les internautes très actifs sur la marque. Ludivine Chaumeille, recrutée à ce poste, prit en charge également la stratégie SEO et SEM de la société complémentaire aux efforts de Community Management dans le cadre d’une stratégie de gestion d’e-réputation.

2.    Mise en place d’une solution de veille

La 1ere étape a consisté à faire l’état des lieux, lire tous les messages postés sur la toile pour décider des actions à mener et mettre en place une solution de veille pour pouvoir être informé dès la parution de nouvelles publications sur la marque afin de pouvoir réagir rapidement.

Comme solution de veille Securitas Direct a choisi Alerti pour sa performance et simplicité d’utilisation ainsi que son rapport qualité/prix, sur la recommandation de l’agence SOS-e-reputation, qui les accompagne dans la gestion de leur réputation en ligne, l’analyse et les recommandations pour optimiser leur e-réputation.

Alerti permet dans un premier temps à SOS-e-reputation de suivre ce qui se dit sur la marque et sur un certain nombre de mots clés sur tous types de sources (blogs, presse en ligne, forums, réseaux sociaux, sites de partages d’images et vidéos) et d’être alerté lors la parution de nouvelles publications. Ils peuvent ainsi surveiller aisément ce qui se dit au sujet de Securitas Direct et ils ont notamment pu démasquer de faux avis, postés par des personnes mal intentionnées dont des concurrents.

Les résultats de recherche sont collectés au sein de leur compte. L’Agence qualifie et catégorise l’information et partage ses alertes avec Securitas Direct  qui peut ainsi accéder directement aux résultats traités. Des graphes leur permettent de voir en un clin d’œil comment évoluent les principales tendances notamment la tonalité des résultats (positifs, négatifs, neutres), la visibilité de la marque sur le web, le type de médias sur lesquels la marque est la plus mentionnée.

Enfin exporter les résultats d’alertes ainsi que les graphes sous forme de pdf permet à la Community Manager de faire aisément circuler l’information  en interne pour que les données analysées et synthétisées soient intégrées dans l’analyse, les recommandations et les prises de décision.

3.    Mise en place de process pour faciliter le dialogue avec les internautes

Chaque jour de nouvelles mentions de la marque apparaissent sur le web. Différentes procédures ont été mises en place pour s’assurer que les questions et commentaires des internautes ne restaient pas sans réponse et pour engager un réel dialogue avec eux.

L’Agence SOS-e-réputation et la Community Manager, surveillent les mentions de la marque sur le web en utilisant Alerti et c’est la Community Manager qui prend la parole sur les forums, blogs, réseaux sociaux. Trois personnes du service client ont aussi été désignées pour travailler en collaboration avec elle et pouvoir résoudre rapidement les problèmes soulevés par les clients quand l’intervention du support technique est nécessaire.

Selon le type de média où la marque est mentionnée, différentes actions sont menées.

Les forums de discussion :

Les forums de discussion sont l’endroit où les internautes s’expriment le plus au sujet de Securitas Direct. La particularité des forums étant que la plupart des utilisateurs s’expriment sous pseudo, il est difficile voir impossible de savoir de qui il s’agit et de vérifier l’information quand un membre fait état de son problème. Certains forums, type lesarnaques.com, permettent cependant aux sociétés d’engager des procédures de médiation quand des litiges émanent de leur clientèle ou de s’enregistrer comme professionnel certifié, ce qui permet de prendre la parole au nom de sa société en étant identifié en tant que tel. L’une des premières choses que Securitas Direct ait faites est donc de s’enregistrer comme professionnel certifié sur différents forums, ce qui lui a permis d’entrer en contact avec ses clients mentionnant sa marque, de leur demander plus de précisions pour pouvoir faciliter la résolution de leur problème quand cela était nécessaire et d’assurer un meilleur suivi de dossier. Et quand un problème est résolu, il est possible de le stipuler clairement.

Une relation de confiance a aussi pu s’établir avec les modérateurs des forums et Securitas Direct a pu faire rectifier des posts qui n’étaient pas exacts ou faire supprimer des posts obsolètes. Nous verrons plus loin comment faire en cas de contenu diffamant ou dénigrant, quand une intervention juridique est nécessaire.

Selon votre organisation, plusieurs personnes peuvent être amenées à poster sur les forums. Dans le cas de Securitas Direct seul le community manager intervient au nom de la société. L’instruction donnée en interne à tous les employés a été de ne surtout jamais intervenir en postant de faux avis pour défendre la société, mais d’être transparent et de simplement répondre aux problématiques des clients.

Les blogs :

La marque Securitas Direct est moins souvent mentionnée sur les blogs que dans les forums de discussion. Quand elle l’est, le process est plus simple, le blogger étant identifié la plupart du temps. La community manager intervient dans ce cas dans les commentaires des posts ou contacte le blogger directement.

Facebook :

Securitas Direct a créé sa page Facebook en début d’année et l’anime avec les dernières actualités de la société ou du contenu autour de la securité, donnant des conseils sur différentes thématiques (assurance, vols, incendies etc) … Cela permet à la marque d’être présente là où certains de ses clients s’expriment et représente un autre canal de conversation.

Twitter :

La société n’a pas de compte Twitter pour l’instant, mais prévoie d’en avoir un prochainement. Pour l’instant le Community Manager suit les mentions de la marque sur ce réseau et intervient via son compte personnel quand cela est nécessaire. Mais la marque est peu mentionnée sur ce média.

4.    Cas particulier – Que faire en cas de diffamation ou dénigrement ?

Au nom de la liberté d’expression, les internautes peuvent-ils tout dire sur vous ou votre marque ? La réponse est non. La liberté d’expression connaît des restrictions nécessaires au respect de vos droits et de votre réputation.

Securitas Direct a été confronté à la problématique de propos diffamants et dénigrants postés à son sujet. Tout l’enjeu est de savoir se défendre et faire valoir ses droits, d’autant que les délais pour agir sont courts, la prescription étant de 3 mois.

La société est accompagnée par le cabinet d’avocats Haas dans ses démarches juridiques et agit selon les préceptes suivants :

Conserver les traces de l’atteinte via un constat probatoire (une capture d’écran n’étant pas recevable) dans le cas où une procédure judiciaire devrait être engagée

  1. Identifier l’auteur des faits litigieux : si l’auteur n’est pas immédiatement identifiable, selon la LCEN, les hébergeurs français ont l’obligation de conserver les données de communication électronique pendant un an. Via une requête du juge il est ainsi possible de demander à un hébergeur de vous communiquer l’IP de l’auteur d’un post, ce qui permettra de l’identifier.
  2. Avant d’envisager une procédure judiciaire il est préférable de demander un retrait amiable au site internet qui héberge le contenu litigieux, via une notification de contenu illicite envoyée par avocat qui met en demeure de retirer sans délai le commentaire. S’il refuse de coopérer, il engage sa responsabilité et une procédure judiciaire est envisageable.
  3. Si les propos ne méritent pas suppression, demander un droit de réponse est une option. La demande doit être adressée au directeur de la publication du site dans le délai de 3 mois suivant la publication du message litigieux.
  4. Engager une procédure judiciaire en dernier recours uniquement

Avant d’envisager une demande de retrait amiable voir une procédure judiciaire il faut bien sûr s’assurer que le contenu est effectivement diffamant ou dénigrant, et non pas une simple critique de sa société ou de ses produits, auquel cas il suffira de répondre à l’article ou commentaire posté. A prendre en considération également le fait que de demander à retirer un contenu peut selon la réaction de son auteur provoquer l’effet inverse de l’effet initialement recherché en attirant l’attention sur ce contenu et en accélérant sa propagation (aussi appelé effet Streisand).

Pour rappel, ci-dessous les définitions de la diffamation et du dénigrement :

Diffamation : Selon l’article 29 de la loi du 29 Juillet 1881, toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommé, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés

Dénigrement : Selon un arrêt de la cour d’appel de Lyon du 27 Mai 1974, le dénigrement correspond au fait de jeter le discrédit sur un concurrent en répandant à son propos ou au sujet de ses produits ou services des informations malveillantes.

5.    Mise en place d’une stratégie de contenu et de SEO

Quand les premiers résultats de Google sur votre marque renvoient vers des avis négatifs cela a un impact direct sur votre image et potentiellement sur votre Chiffre d’Affaires. Ce qui était le cas de Securitas Direct pour qui le 2eme lien en 1ere page de Google renvoyait vers des avis négatifs et obsolètes datant de 2007 à 2010.

Que faire dans ce cas ? A moins que vous ne puissiez faire supprimer le contenu en question suite à une décision judiciaire ou une demande de retrait amiable, si le site sur lequel votre marque est mentionnée a un pagerank élevé, il sera très difficile de parvenir à faire reculer de manière significative le lien dans Google.

Dans le cas de Securitas Direct, leur présence sur le web étant limitée à un site peu fourni en contenu, ils ont commencé, en collaboration avec l’Agence SOS-e-réputation, par créer davantage de contenu officiel sur leur marque (descriptifs produits, témoignages clients, études de cas etc.), avec comme objectif de produire du contenu ayant de la valeur, qui soit bien indexé dans les résultats Google.

Autant de contenu qu’ils peuvent utiliser également pour alimenter leurs comptes sociaux, qui eux-mêmes entrent dans le cadre de leur stratégie de contenu et de présence sur le web et qui viennent se positionner dans les résultats Google. En plus de sa page Facebook Securitas Direct alimente ainsi un compte Youtube et Viadéo et vient d’ouvrir un compte Pinterest.

Les résultats

Suite aux différentes actions menées, Securitas Direct a vu son nombre de mentions positives sur le web augmenter (+50%), le nombre de plaintes diminuer et la confiance avec les internautes se restaurer. Pour ce qui est des liens Google, certains ont été supprimés suite au retrait du contenu et d’autres ont reculé. Il s’agit bien sûr d’un travail de fond qui doit être effectué en continu, rien n’étant jamais acquis. La tâche semblait difficile au départ mais les résultats sont pour l’instant satisfaisants. L’important est d’instaurer le dialogue avec les internautes, d’être transparent, de se montrer ouvert à la critique et de savoir tirer parti de cette critique pour améliorer justement ses process, la qualité de son service client, ses produits et services.

Il n’est donc jamais trop tard pour agir, mais les traces laissées et l’absence durable de prise de parole rend plus longue et difficile la reprise en main. Si les internautes sont actifs et parlent de votre marque, ils ne vous laissent pas le choix. Mais même dans le cas où vous seriez peu mentionné sur le web il est important d’y être présent. A défaut d’être proactif, être au moins en veille est indispensable pour pouvoir réagir rapidement en cas de contenu négatif posté à votre égard.

A propos de l'auteur

Djivan Minassian

Djivan Minassian  (81 articles)

Social Media Manager - Freelance Gérant Spitak.fr / @MyCommunityMgr & @MyGuerillaMkg #CM Prof à Kedge Business School

Création WordPress à Paris, Sion et Dakar - Social Media et Community Management à Marseille