Pas une semaine ne passe sans que les grandes plateformes sociales (Facebook, Twitter, Google+, Pinterest…) ne fassent la une. Notre écosystème social media, un brin moutonnier, aime débattre et spéculer sur le futur de ces plateformes. Comme si, à travers elles, l’avenir de nos stratégies communautaires se jouait.
Et si je vous disais que braquer uniquement le regard sur ces géants était peut-être une belle boulette ? Plongez avec moi dans les méandres du Dark social. 😉
1. Le dark social : une révolution dans le social media ?
Le terme « Dark social »est apparu en 2012 sous la plume d’Alexis Madrigal dans un article pour The Atlantic. On désigne derrière cette expression, l’ensemble des interactions sociales réalisées en dehors des médias sociaux traditionnels. Concrètement, il s’agit d’articles copiés-collés qui sont envoyés par e-mails, de liens ou d’images qui sont diffusés par messagerie instantanée…
Ce qu’il y a d’incroyable avec le Dark social c’est qu’il représente 69% de l’activité de partage à l’échelle mondiale alors même qu’il est ignoré par la plupart des marques !
La majorité des entreprises dépensent donc aujourd’hui des ressources considérables en se concentrant sur des plateformes qui ne sont pas celles qui génèrent le plus d’interactions sociales.
Pour mesurer plus précisément le poids du Dark social, la société RadiumOne a publié un livre blanc basé sur les résultats d’une enquête menée en octobre 2014 auprès de 9 027 internautes en Europe, aux États-Unis et en Australie. Outre la part du Dark social dans l’activité de partage au niveau mondial, cette enquête regorge de chiffres très intéressants.
2 – 96% des Français utilisent le Dark social.
Parmi les Français qui partagent effectivement du contenu en ligne, près de 96% d’entre-eux utilisent aussi le Dark social en plus des médias sociaux classiques (Graphique 1). Cette étude souligne aussi que 39% des Français qui partagent du contenu sur le web ne le font qu’à travers le Dark social (Graphique 2).
Ainsi, selon RadiumOne, le Dark Social représente près de 81 % des partages sociaux sur le web en France, très loin devant Facebook (11% de la part de ces échanges) et des autres réseaux sociaux réunis (8% des échanges).
Ces premiers éléments issus de cette étude démontrent que le Dark social est de très loin la première source de partage de contenu et d’interaction sur le web alors même que la majorité des entreprises ne s’y intéresse pas encore et concentre leur présence sur des plateformes dont le rôle dans le partage de contenu et l’interaction sociale est très largement minoritaire.
Rupert Staines, directeur général Europe de RadiumOne : « Le Dark social est tout simplement trop important pour être ignoré ; le partage sur le dark social dépasse celui effectué sur Facebook et sur tous les autres canaux sociaux combinés »
Graphique 1
3 – Un enjeu crucial suivant les secteurs d’activité et les pays
Même si le Dark social joue globalement un rôle considérable dans la génération d’interactions sociales, de trafic et dans les partages sociaux, ce rôle fluctue suivant les secteurs d’activités et les pays examinés.
RadiumOne s’est donc aussi penché sur l’origine des clics provenant des médias sociaux en fonction des secteurs d’activité et des pays. Et les résultats sont pour le moins intéressants.
Ainsi sur l’ensemble des zones géographiques analysées par RadiumOne, le Dark social à un rôle clairement minoritaire dans la génération de trafic en provenance des médias sociaux pour les entreprises vendant des boissons ou des produits alimentaires. Pour ces dernières, le Dark social n’est responsable que de 5% des clics. Ces entreprises ont donc globalement intérêt à continuer à focaliser leurs efforts sur les médias sociaux connus et en particulier sur Facebook qui est à l’origine de 76% des clickbacks sur les contenus partagés. (Graphique 4).
En revanche, les médias d’information par exemple, ont tout intérêt à focaliser aussi leurs efforts sur le Dark social qui est à l’origine de 41% des clics vers des contenus d’actualité. Ce rapport est quasiment identique pour les organisations spécialisées dans le secteur de la santé et du bien-être (47% des clics vers des contenus partagés viennent du Dark social) ou encore pour les entreprises dans le secteur du sport (34% des clics vers des contenu partagés proviennent du Dark social).
Enfin, cette enquête permet aussi de montrer combien les différences entre les pays peuvent être importantes. Juste au-dessus, j’indiquais que le Dark social est la première source de trafic issu des médias sociaux pour les entreprises proposant des produits ou des services dans la santé ou le bien-être.
Et bien cette affirmation est fausse pour la France. 😉 Les Français ne ressentent pas de freins particuliers pour parler de leur santé sur les médias sociaux et en particulier sur Facebook qui est à l’origine de 45% des clics sur des liens partagés par leur réseau vers des contenus « santé ou bien-être ». En Australie, en revanche, c’est l’inverse. Les Australiens sont réticents à l’idée d’aborder des questions de santé ou de bien-être sur des plateformes comme Facebook. Ils préfèrent discuter de ces thématiques sur le Dark social (68% des clics vers des contenus santé/bien être viennent du Dark social en Australie).
Ces différences culturelles mises en avant par cette étude sont aussi intéressantes à analyser notamment pour le secteur de l’informatique et des nouvelles technologies qui sont deux secteurs dans lesquels les marques sont massivement présentes sur les médias sociaux. Pourtant, quand on regarde les chiffres, le Dark social représente tout de même 29% des clics vers des contenus high-tech partagés en France et même 58% de ces clicbacks en Australie ! (Graphique 4).
Graphique 4
4 – Pourquoi s’intéresser au Dark social ?
Être capable d’analyser ce qui est à l’origine de 69% de l’activité de partage sur les médias sociaux à l’échelle mondiale permet de :
- Mieux comprendre les datas sociales qui gravitent autour de sa marque. Le Dark social génère un volume impressionnant de données, bien supérieur à celui généré par les plateformes sociales plus connues (Facebook, Twitter, Google+…). Être capable de collecter ces données, les agréger avec celles issues des autres médias sociaux pour leur donner un sens c’est non seulement mieux comprendre les besoins de ses prospects et ainsi améliorer ses campagnes marketing crosscanal, mais c’est aussi optimiser son CRM en étant plus en adéquation avec les attentes de ses clients. C’est enfin un moyen d’étoffer son offre de produits ou de services en utilisant ces données pour améliorer sa compréhension de son marché.
- Accroitre le ROI des campagnes de social marketing. Un article, une fiche produit ou un avis consommateur partagé à travers le Dark social a un impact bien supérieur dans le parcours d’achat de l’internaute que le même contenu diffusé sur les grandes plateformes communautaires. Et ce pour une raison simple : les connections effectuées dans le Dark social (partage d’articles ou de liens par e-mail par exemple) ont une valeur prescriptive bien plus importante qu’un avis partagé sur Facebook ou sur une autre plateforme sociale parce que les personnes qui nous font suivre ces contenus sont bien souvent nos plus proches connaissances. Ces partages sont aussi par définition désintéressés : on ne cherche pas à cumuler des likes ou des repins par vanité mais bien à aider un ami ou un membre de sa famille.
5 – Comment mieux comprendre et tracker l’audience issue du dark social ?
Pour mieux tracker cette audience issu du dark social, l’une des clés est de proposer un maximum de widgets de partage de contenus aux internautes contenant chacune une URL raccourcie. Ainsi, il sera possible non seulement de chiffrer le volume de trafic et d’interaction issu du dark social sur ces contenus mais aussi d’améliorer les conversions ou encore de permettre aux internautes d’avoir un maximum de place pour décrire ces contenus qu’ils souhaitent partager.
Proposer des URLs courtes contenant des liens trackés est d’ailleurs particulièrement utiles pour certains secteurs d’activité. Par exemple, la moyenne des clics générés depuis des URLs courtes dans l’univers du shopping est de 3,360 clics à l’échelle mondiale. Elle est de 2,148 clics uniquement pour la France.
Graphique 5
6 – Un exemple d’utilisation réussie du Dark social : le cas Ghirardelli
Premier fabricant de chocolat basé à San Francisco, cette entreprise a récemment pris conscience du volume du Dark social sur son site web. Fin 2013, la marque décide d’intégrer des boutons de partage social adaptés et contenant une URL courte sur ses pages web hébergeant des recettes et des astuces à destination des internautes. Cela a ainsi permis à Chris Pemberton, digital brand manager de la marque d’avoir un tableau bien plus complet du partage social généré sur le site web de son entreprise.
Chris Pemberton, digital brand manager de Ghirardelli « Nous avons été très surpris de constater que 84% de l’activité de partage sur notre site était généré par le dark social. Ce qui signifie que 84% de l’activité totale de partage nous était jusqu’alors cachée« .
Conclusion :
S’intéresser au Dark social ne signifie évidemment pas qu’il faille délaisser les plateformes sociales bien connues. Mais cela démontre que notre présence social media ne doit pas se limiter aux plateformes sur lesquelles nous avons décidé d’être présents. L’appétence pour le partage et l’interaction sociale de nos communautés dépassent les plateformes à la mode et est très largement sous-estimée.
Ainsi en 2015, personne ne pourra faire l’économie de mener une réflexion même balbutiante sur l’apport possible du Dark social et comment se dernier peut être intégré à une stratégie sociale et communautaire complète et cohérente.
- Et vous, quel est votre avis sur l’apport du Dark social pour les marques ? Avez-vous déjà entamé des actions pour mieux le prendre en compte dans vos stratégies social media ?
Pour creuser le sujet : Télécharger le livre blanc de RadiumOne