Orangina secoue-t-il trop sa com 2.0 ?

Décidément, je pense vraiment de plus en plus que la chasse au bad buzz est vraiment devenu un « sport » à la mode sur le web 2.0 et 3.0. Dernier cas en date : la Fan-Page Facebook et le compte Twitter d’Orangina France. A la source du buzz (car c’est encore trop tôt dans cet article de dire si s’en est un « bad » ou pas), le post suivant :

Tout part donc de la prise de contrôle supposé du mur Facebook par le célèbre Orangina rouge. Et pour ceux qui ne le sauraient pas encore ce dernier a la particularité d’être vraiment très méchant, comme le prouve cette publicité de 1996 :

Notre cher Orangina Rouge, et, en lien avec l’actualité des sorties de film, se permet de faire un commentaire sur le dernier Harry Potter, en faisant une blague sur les Roux. Comme de bien entendu, il n’a pas fallu longtemps pour voir apparaître sur le mur de la Fan-Page et sur le compte Twitter officiel des remarques négatives, ainsi que les traditionnels trolls et « rageux » qui ont pour habitude de faire feu de tout bois. Mais comme vous commencez sans doute à le savoir, sur MyCM, on ne s’attarde pas au premier niveau de lecture et on essaye de lire entre les lignes. Alors Orangina est-il à la source d’un nouveau bad buzz ? Rien n’est moins sûr.

Orangina, un positionnement stratégique en matière de communication volontairement décalé.

Hormis si depuis ces dernières temps vous avez vécu sur une planète lointaine sans télévision ni ordinateur et encore moins de smartphone, et que vous avez vu ou entre aperçu les publicités Orangina, vous aurez remarqué le ton très décalé de ces dernières. C’est qu’à l’origine de cette stratégie il y a l’agence Fred&Farid, agence connue pour sa forte valeur-ajoutée créative. Et le moins que l’on puisse dire c’est que le choix de l’axe de communication se base sur un fort parti pris comme le prouve ces deux exemples de publicité récente :

ou bien encore :

Il n’est donc pas aberrant de retrouver cette approche dans la communication « social media » d’Orangina, et donc de retrouver Orangina Rouge en pirate de mur Facebook. Cela est bel et bien conforme à l’image et au positionnement produit, reste raccord avec l’axe créatif adopté pour le territoire de marque et de communication de la marque, et s’inscrit finalement dans une logique initiée dès le départ par l’agence Fred&Farid.

Et pourtant, et de manière assez rapide, est apparu sur la Fan Page, en commentaire du post sur le film de Harry Potter et sur la mention des roux le type de commentaires suivants :

ainsi que sur le compte Twitter :

Comme vous pouvez le constater, les avis sont relativement partagés sur cette action de communication 2.0. Orangina rouge et son fouet sont bien loin de faire l’unanimité. On peut dire que même la porte ouverte au débordement de type « trollesque » a été ouverte. C’est d’ailleurs pourquoi les CM derrière les outils sociaux sont depuis le début de ce « buzz » très présent et assez réactif.

Il faut sauver le soldat roux.

En fait, si on y regarde de plus près, force est de constater que Orangina vient d’apprendre à ses dépens (ou non) que sur les réseaux sociaux et le web 2.0, l’humour est à manier souvent avec des baguettes. Il est sans doute loin le temps des Desproges, Coluche et consort. Il semblerait que dans notre société le moindre sujet même traité de façon humoristique peut être sujet à controverse et/ou à débat. Et même avec le succès de sites internet comme 10 minutes à perdre, il n’est pas évident de se moquer de tout, et ici particulièrement des roux.

Ne comptez pas sur moi pour vous sortir les grandes études philosophico-psychologiques sur le mal-être et les difficultés des roux. En plus de faire partie d’une population minoritaire (thème d’ailleurs très à la mode en cette future période présidentielle), les roux, comme les Belges et consort, font l’objet de nombreuses blagues. Je vous arrête d’ailleurs de suite : je ne souhaite pas rentrer dans le débat sur la condition des roux dans le monde et dans la société. Continuons à parler communication 2.0, svp.

Le principal reproche donc fait à l’opération Orangina rouge (j’aime bien donner des noms de code) est son « humour douteux », c’est-à-dire plus exactement cette partie là : « mais un roux qui a des amis ». Bien sûr, ceux qui ne connaissent tout l’historique des blagues sur les roux, ne comprennent pas trop ce que cela vient faire dans la publication, hormis une vague référence à Ron (le personnage roux de Harry Potter au cas où vous auriez été sur une île déserte). Sauf que bien sûr, et c’est bien dans la nature humaine, beaucoup se sont engouffrés dans la brèche de la publication pour s’engager sur un terrain de débat, auquel d’ailleurs Orangina n’avait même pas pensé, ce qui me rappelle un peu le cas Petit Bateau. Entre ceux qui veulent sauver le soldat roux et ceux qui prennent la blague d’Orangina rouge pour seulement une blague, de mauvais goût ou non, le débat est lancé. Saupoudrez ce dernier de quelques trolls et voici un exemple de communication 2.0 en marche. Et au final, on risque de finir par oublier le plus important : la communication autour d’Orangina rouge.

Stagiaire sort de ce corps.

Mais finalement ce que je trouve le plus marrant au moment où j’écris cet article c’est le retour de certains à l’explication suivante : « De toute façon c’est une blague potache donc c’est forcément un stagiaire. Mais où est son maître de stage ? Quid de celui qui devrait l’encadrer et le contrôler ? Finalement dire que c’est Orangina rouge n’est pas une tentative de récupérer le coup avant bad buzz ? ». Soyons d’accord : je ne dis pas que cette théorie ne pourrait pas s’avérer vraie, et j’y aurais sans doute cru quelques années où des agences comme Fred&Farid découvrait le digital, qui n’était pas forcément génétiquement dans leur façon de penser la communication.

Mais depuis quelques temps, ces agences, et particulièrement F&F, se sont dotées plus ou moins de compétences à même de répondre aux problématiques digitales et 2.0 des marques et des entreprises. L’excuse du stagiaire que l’on a souvent vue être mise en avant pour expliquer tel ou tel bad buzz a un peu vécu. Les stagiaires ont bon dos. Alors certes, et j’aime à nuancer mon propos, il y a encore quelques cas (trop nombreux encore diront certains) de stagiaires lâchés dans la jungle du 2.0 sans encadrement compétent mais quand même…. dans la cas de F&F je pense que sincèrement l’idée basée sur Orangina rouge été bien l’idée directrice.

D’ailleurs, comme le souligne Malicia Malices sur la page fan de My Community Manager :
On peut donc constater que le coup de com 2.0 semble bien prémédité.

Conclusion : Bad Buzz or not bad buzz ?

Comme vous l’aurez sans doute subodoré, pour ma part, le bad buzz n’est pas vraiment avéré. Tout d’abord, et tout simplement, parce que les cibles principales d’Orangina ne sont pas sur la Fan Page et pour une grande majorité n’auront même pas vent de cette histoire à propos des roux. Deuxièmement parce qu’encore une fois cette ligne éditoriale 2.0 s’inscrit bien dans la ligne directrice principale de la stratégie de communication et le positionnement d’Orangina. Après, on peut bien sûr discuter du fond du message, au risque de rentrer dans un débat sans fin. Je pense très sincèrement que dans l’échelle de gravité mondiale les roux soient une priorité. Je comprends que certains soient affectés par cette condition ou touchés souvent par les mauvaises blagues qui circulent à leur propos.  Mais pour autant je ne suis pas d’accord pour utiliser le mur d’une Fan Page pour régler toutes les « inégalités » de ce monde, un peu encore une fois comme dans le cas de Petit Bateau.

Finalement, ce qui me fait le plus peur, c’est qu’avec ce type d’exemple, et le fait que dans ce cas Orangina par le biais de Facebook Question suggère une possibilité de s’excuser ou non, les réseaux sociaux sacrent la mise à mort à terme de l’humour, car on n’aura plus le droit de rigoler de rien. Alors sans pour autant verser dans la liberté d’expression à tout prix, je me demande quand même quelles seront les limites de la bien pensance universelle.

Et vous, quel est votre avis ?

A propos de l'auteur

Olivier Murat

Olivier Murat  (34 articles)

Consultant et professeur en communication 360, avec un goût prononcé pour le marketing social, l'influence des réseaux sociaux dans les stratégies de communication et la disruption, j'essaye de faire partager ma passion auprès de mes élèves, mais aussi auprès de mes clients. Curieux, ouvert, dynamique, et réactif autant de valeurs qui composent ma personnalité, et que je mets au service de mes rencontres personnelles et professionnelles. J'espère vous faire partager mes centres d'intérêt et débattre avec vous.

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