Le Community management ou l’éclosion logique d’un métier en gestation

Avec l’officialisation du métier de Community manager selon l’APEC 2010, ce « jeune pousse » en fait souvent sourire plus d’un. On ne compte plus non plus les spécialistes du web se proclamant « Community manager expert » en ventant les mérites de techniques générant 5000 fans ou followers en 1 semaine (lire l’article sur les gourous du web). Vous l’aurez compris, cette profession souffre de beaucoup de préjugés et peine à convaincre certains sceptiques.

Pourtant en portant un regard détaillé du panorama, nous allons percevoir que le Community management existait bien avant qu’il n’inonde nos « timelines » et qu’il répond à des besoins profonds et durables.

Un Contexte

Tout le monde sera d’accord si je dis que l’avènement du web a changé radicalement la perception que les gens ont de l‘accès à l’information. Plus qu’une source inépuisable de savoirs, Internet est devenu un membre à part entière du foyer (en 2010, 70% de français sont équipés d’un poste connecté chez eux). Qu’on se le dise, le temps des allez-retours chez nos amis pour envoyer un mail est bel et bien une époque révolue.

Devant un tel engouement, le web s’est vite adapté à cette audience exponentielle en lui procurant des outils simples et complets pour faciliter son accès aux informations et à leur partage.  Des premiers skyblogs (et oui cela ne nous rajeunit pas) aux Facebook et Twitter que nous connaissons aujourd’hui, le client est plus que jamais Roi. Sans cesse, il dispose de nouvelles scènes toujours plus instinctives à prendre en main et suffisamment puissantes pour faire raisonner son discours. Ce n’est pas l’ascension fulgurante du nombre de séniors sur le web qui me contredira.

Face au gouffre sans fond de contenus piégés dans la toile, on a vite parlé d’« infobésité ». Heureusement, cette chère technologie s’est arrangée pour nous permettre de contrôler ce flux assommant en contrôlant et sélectionnant nous-même les informations qui viennent à nous. Enregistrements, mp3, vidéo à la demande etc. Ahh, qu’il est loin le temps où notre cher téléspectateur se frottait les mains en voyant les publicités débouler sur sa télévision… Que penser alors de l’impact des publicités qui nous entourent ?

Depuis le web est devenu… le web 2.0 (attention les yeux ça brille !!), et les blogs ou autres médias sociaux sont devenus des plateformes d’échanges, de dialogues et d’opinions. À présent il ne faut plus se voiler la face, n’importe quel internaute peut devenir un prescripteur en puissance et influencer les choix et les avis de ses pairs. La question de la traçabilité prend alors tout son sens : les paroles partent, les écrits restent.

Dès lors, une entreprise ne peut plus rester les bras croisés en attendant que sa réputation numérique lui joue des tours. Bien entendu, un commentaire négatif perdu dans les abysses d’un forum inconnu a peu de chance de nuire profondément à l’image d’une marque. Mais gardons à l’esprit que le web 2.0 a instauré la dynamique du partage, et qu’un simple flocon peut vite se transformer en boule de neige.

Notons au passage qu’avec le raz de marée des smartphones, le consommateur utilise Internet à tout moment de la journée, chez lui comme dans la rue !! Voilà donc nos charmants consommateurs prêts à échanger ensemble sur votre société en bien, comme en mal.

==>   Le média Internet a donc créé et offert un réel pouvoir aux internautes, c’est-à-dire aux consommateurs comme aux entreprises.

De nouvelles mentalités

Il est vrai, Internet procure un sentiment inouï de liberté et de puissance. Tout peut se trouver sur le net et en quelques clics seulement. Toutes les personnes qui surfent sur cet océan de connaissances ressentent ce pouvoir entre leurs doigts. Mais comme souvent, de nouvelles capacités induisent de nouvelles attentes.

L’arrivée des médias sociaux a resserré l’aspect humain entre les « consonautes », consolidant leur volonté de créer et d’échanger du lien, de confronter leurs points de vues. Fini les contacts anonymes, les internautes revendiquent leurs appartenances, leurs goûts et s’allient avec leurs « amis » pour créer des communautés virtuelles.

C’est pourquoi face à ces possibilités quasi infinies, l’internaute demande PLUS aux entreprises dont ils achètent les produits.

Les codes pour communiquer et séduire en faisant passer un message semblent avoir changé. Pourquoi ? Tout simplement car les consommateurs contrôlent leur accès aux médias et attendent des marques qu’elles soient attentives à leurs désirs. Ils cherchent désormais des solutions et non des produits à tout prix. Pour preuve, le déclin croissant de l’attractivité de la communication verticale démontre ce « syndrome de la bannière invisible ». Une simple publicité ne suffit plus pour séduire. En 2010, 90 % des téléspectateurs avouent passer la publicité lorsqu’ils le peuvent, et seulement 18 % des campagnes de publicité télévisées génèrent un retour sur investissement positif.

De plus, la société dans laquelle nous vivons instaure une course contre la montre perpétuelle qui nous rend aveugle à la plupart des publicités traditionnelles. Les gens n’ont pas le temps, et plutôt  qu’attendre que l’information vienne à eux, ils vont maintenant le plus souvent directement vers elle ;  ils choisissent.

Vous l’aurez donc compris, une entreprise doit aujourd’hui voir au-delà de pratiques ayant pourtant très bien fonctionné depuis des décennies. Une démarche d’écoute  et de dialogue s’avère ainsi indispensable pour créer, développer et consolider la cohésion d’une communauté. De nouveaux paradigmes de communication où les maîtres mots sont : la transparence, l’empathie la réactivité, la diplomatie, le dialogue… Le consommateur veut se sentir écouté, compris, et unique. Une sacrée paire de manches même pour les partisans de la communication « one to one ».

Pourtant, le web peut réussir cette prouesse moyennant du temps et de la persévérance. Bien entendu, une entreprise peut ne pas se positionner sur ces problématiques et demeurer sourde et muette sur Internet. Mais la concurrence en fera t’elle de même ? Mieux vaut garder en tête quelques données :

–  74% des internautes confient être influencés par l’avis d’un pair sur un forum ou une discussion en ligne plutôt que par une simple promotion de communication descendante,

–  78% des consommateurs font confiance aux recommandations contre 14% seulement à la publicité. (Sachant que selon la « théorie du petit monde », n’importe quelle internaute est à une distance de 6 contacts d’un autre (voir le livre « Six pixels de séparation »), on peut vite saisir l’importance de séduire ces personnes avant qu’elles ne donnent leur avis)

==> Le pouvoir proféré aux internautes a modifié leur attentes et leurs besoins de consommation. Devant nos écrans, ces publicités présentant des produits pouvant ôter des tâches vieilles de 20 ans ne séduisent plus. C’est bien en tendant la main durablement au consommateur qu’il pourra avoir confiance, acheter nos produits, être fidélisé et les recommander par la suite.

Un métier pas si nouveau

Et non au risque d’en décevoir quelques-uns, le Community management n’a pas jailli de la terre au moment où  les gens ont commencé à en parler. En réalité, les graines avaient déjà été semées bien avant que la question « qu’est-ce que le web2.0 ? » n’apparaisse sur un forum.

Aux prémices d’une volonté d’échanges et de partage sur la toile, ce sont les forums (ou IRC pour les nostalgiques) des jeux-vidéos en ligne qui ont vu les premiers « modérateurs »  gérer les communautés. Ils veillaient au bon fonctionnement des plateformes, au respect des règles et dialoguaient sans compter les heures. Au fil des années, les entreprises sont venues à se questionner sur ces plateformes. Les premiers directeurs ont alors décidé d’entrer en contact avec leurs clients pour satisfaire le plus grand nombre, même les plus réticents. Le but étant de trouver un équilibre entre identité numérique (l’image que l’on souhaite véhiculer) et la réputation numérique (ce que l’on pense de nous).

Sous le prisme de possibilités virtuelles croissantes et de désirs de consommateurs toujours plus chronophages, le Community manager est devenu la solution évidente d’un besoin de contrôle et de gestion de la vie numérique des marques.

==> Le Community manager est donc la personne qui va partager le pouvoir du web avec les clients de la ou les marque(s) qu’il représente en répondant chaque jour de manière pro-active aux nouveaux besoins et attentes de sa communauté.

En résumé

Le métier de Community manager n’est donc pas arrivé comme un cheveu sur la soupe pour répondre à des besoins ponctuels. En regardant de plus près, on se rend vite compte qu’il s’agit d’une profession ayant évolué en sommeil pendant de nombreuses années et qui s’est approprié les changements inhérents à l’arrivé d’Internet. L’avènement du Web 2.0 n’a finalement que fait éclore au grand jour le besoin d’un tel poste pour l’entreprise.

Alors oui pour le moment cette profession n’en est qu’à ses balbutiements, mais ces expérimentations se révèlent surtout du coté des sociétés. Les marques doivent en effet encore réfléchir sur ces nouvelles problématiques pour analyser de manière objective leurs attentes et définir la nécessité ou non d’un Community Manager en leur sein. Tout le monde ne peut certes pas se payer le  « luxe » de créer une poste, mais même les plus petites sociétés peuvent communiquer efficacement avec leurs clients dans une dynamique de dialogue. Reste le problème du temps.

L’essentiel est bien de comprendre qu’avant de se précipiter à vouloir embaucher un Community Manager, il faut se poser les bonnes questions :

–  Réalisons-nous la nature, la fonction de ce métier, et ce que la création d’un tel poste implique ?

–  Voulons-nous entendre ce que nos clients ont à dire et instaurer une relation de confiance avec eux le temps de notre campagne virale ou bien le faire pour du plus long terme ?

–  Le Community Manager va-t-il me permettre d’augmenter mon chiffre d’affaire de xx% tel un Clark Kent refoulé ou peut-il séduire, faire participer et fidéliser une clientèle qui m’intéresse ?

À vous de jouer 😉 !

Qu’en pensez-vous ?

A propos de l'auteur

Ronan Boussicaud

Ronan Boussicaud  (18 articles)

Community manager / webmarketeur au sein de l'agence Useweb, je développe des analyses mêlant web 2.0 et psychologie sur mon blog « La Psyché du Web social » et participe à des ouvrages numériques collaboratifs. Je rédige aussi des articles sur des sites spécialisés (comme My Community Manager Webmarketing&Com) et anime régulièrement des conférences autour du community management et des médias sociaux. En octobre 2012, j'ai publié un ouvrage co-écrit intitulé "Tout savoir sur... La marque face aux bad buzz : anticiper et gérer les crises sur les médias sociaux" aux éditions Kawa. Grand curieux et cinéphile dans l'âme, le web social me colle à la peau. Passionné par le web communautaire mais aussi par toutes les formes de communication humaines, je crois profondément au relationnel et à l'échange. Alors, pourquoi ne pas vous joindre à nous ?

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