Le Community Management global a besoin d’une adaptabilité locale !

Internet a affranchi les frontières, faisant qu’un animateur de communauté en Allemagne peut être amené à gérer les consommateurs thaïlandais d’une entreprise. Plusieurs phénomènes tendent à confirmer ce fait. D’une part, les multinationales centralisent leurs processus de communication au sein d’un même et unique département afin de gérer une image globale. D’autre part, à la manière des centres d’appels, l’avènement de services d’animation de communauté lowcost amène inexorablement à la décentralisation des services vers des centres spécialisés se trouvant dans des pays tiers.

Il en résulte inexorablement un choc culturel, où l’animateur de communauté peut se trouver confronter à une vision sociétale qui tranche avec le discours qu’il promeut, ou à une actualité locale dont il n’aurait pas saisi le sens.

Pour ma part, j’ai travaillé pour une école de commerce internationale. Riche expérience, car nous avions quelque 70 nationalités différentes présentes sur le campus, et pas mal de pays à prospecter en l’occurrence. Seulement, vous ne communiquez pas de la même manière avec des Chinois et avec des Australiens, il y a certaines choses qui ne se font pas. Je ne rentrerai pas dans les détails au risque de nourrir les trolls, retenez simplement que l’on ne peut communiquer de manière globale, car il y a des codes sociétaux qui ne se font pas.

Récemment, deux bad buzz sur les médias sociaux m’ont amené à conforter cette réflexion quant à la nécessité de segmenter le community management pour mieux répondre à une demande local. 

 

1 – Prendre en considération l’appréhension de la population 

Nous l’avons bien vu dans la polémique sur le film « Innoncence of The Muslims », très souvent un produit, qu’il soit un très mauvais film comme un très bon café, est associé à son pays, comme si ce produit était nécessairement un catalyseur de valeur morale propre à une Nation. En l’occurrence, dans le cadre du navet anti-islam, il y a eu amalgame entre le réalisateur et les États-Unis ( par exemple, les drapeaux américains brulés là où évidemment ces derniers ne cautionnaient pas le court-métrage). Cette notion de rapprochement cognitif entre une marque et des valeurs sociétales est très importante. Il faut prendre en considération l’appréhension de la population locale pour le pays affilié à la marque afin de mettre en place un discours cohérent qui va éviter les soubresauts « patriotiques » ou les amalgames.

Un excellent exemple est ce qu’il s’est passé chez Starbuks, en Argentine. Il faut bien comprendre que les États-Unis trainent une image liée à son impérialisme, exploitant les pays en développement, imposant une démocratie qui lui sert et se considérant comme le modèle à suivre. À la base, il y a un simple message anodin, qui se veut transparent. La marque de café s’est excusée, maladroitement, sur Twitter de ne pouvoir fournir dans ses succursales régionales des gobelets en provenance des É.-U. et de devoir par conséquent se contenter de produits locaux.

Même si l’objectif était d’indiquer que les produits n’étaient pas siglés, et non pas de mettre en avant le caractère médiocre des produits argentins, l’amalgame fait avec la perception du pays émetteur, en l’occurrence les É.-U., a été fatal et le bad buzz a soufflé. Comme l’explique justement Olivier Cimelière  :

« À l’ère de la mondialisation de la communication des grandes entreprises internationales, la tentation d’homogénéiser les messages et les pratiques est effectivement largement répandue. Résultat : fort de sa vision stratégique globale, quelqu’un concocte au siège les éléments de langage qui doivent ensuite s’appliquer en toutes circonstances et qui sont supposés régler les demandes émanant des marchés locaux. Si séduisante et rassurante soit-elle sur le papier, cette approche n’est surtout qu’une pure chimère communicante que des spécificités liées à un écosystème local n’ont aucun mal à battre en brèche. »

Fait : Il faut donc prendre en considération, lorsque l’on anime une communauté, de l’image que va indubitablement véhiculer le rattachement à une nation. Pour la France, cela peut être le colonialisme ou la France Afrique par exemple.

 

2 – Prendre en considération l’actualité locale

S’il y a bien une chose à prendre en considération lorsque l’on anime des communautés, c’est bien l’actualité qui s’y passe pour pouvoir éviter les pièges et susciter des réactions hostiles. En juillet 2012, suite à la tuerie d’Aurora, le compte Twitter de Celeb Boutique se réjouit de voir l’hashtag #Aurora en trending topic, augurant un succès de la robe du même nom. Comme invoqué dans les excuses de la marque, l’animateur de communauté n’était pas basé aux É.-U. et a simplement regardé les trending topics pour se faire un avis. Ce fut une grave erreur, car en s’appropriant des faits dramatiques, la marque a subi le courroux des internautes.

Fait : Il faut donc effectuer une veille sur l’actualité d’un pays, prendre en compte la nature d’un buzz et le relié à des événements identifiables ou identifiés avant de prendre une décision qui pourrait être fatale.

 

Conclusion 

Qu’importe les raisons de sa délocalisation, un community manager doit se tenir informé d’une actualité, doit avoir pris en considération les diversités culturelles et doit avoir appréhendé l’image du pays représentant la marque s’il veut établir un discours pertinent adapté à un marché hyper ciblé. 

À l’heure de la mondialisation, les médias sociaux ont sacralisé la parole des internautes, créant de nouvelles logiques de communication, à savoir basées sur le relationnel, rendant inéluctablement la notion de « local » un paradoxe bien réel ! Preuve en est l’arrivée des Global Pages sur Facebook qui permettent de jongler rapidement entre différents espaces selon les régions. Ces pages permettent aux « utilisateurs d’être dirigés vers la version la plus appropriée d’une page en fonction de leur pays, leur permettant de voir de manière localisée les photos de couverture, les photos de profil, les applications, la page d’information « à propos » ou le flux de nouvelles de la page-tout en faisant partie de la communauté mondiale de la marque mondiale.» 

S’adapter à un marché ciblé dans un contexte global, tel est l’un des plus grands défis, aujourd’hui des community manager. 

 

A propos de l'auteur

Antoine Dupin

Antoine Dupin  (8 articles)

Passionné par Internet et la communication, j’ai la chance d’en faire mon métier. Spécialiste des médias sociaux et des relations d’un internaute à une marque, j’effectue une veille quotidienne sur ce passionnant environnement que je partage au travers de mon compte Twitter. Vous pouvez lire mes analyses sur mon blog, sur les différents livres numériques auxquels j’ai participé mais également, bientôt, vous procurer mon ouvrage « La Pratique des Médias Sociaux » qui devrait très prochainement être publié.

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