Google Plus aura-t-il sa place au panthéon des médias sociaux ?

Après seulement quelques mois d’existence, beaucoup de web-addict ne donnaient plus cher de la peau du réseau social de Google. Pourtant arrivé en grande pompe à coups d’invitations privées, les gens ont préféré s’y inscrire tout en restant au chaud chez M. Zuckerberg, et ainsi laisser Google Plus comme un « No man’s land ».

Pourtant certains irréductibles avaient raison d’attendre le réveil du géant américain. Avec l’annonce fracassante et tant attendue des pages Google+ pour les entreprises, c’est le prequel d’une autre dimension qui est insufflé à ce nouveau né déjà ridé.

Alors Google Plus pourrait-il être l’élu (chuuutt Néo je parle !) ? Comment expliquer ces débuts en montagne russe ? Facebook n’est-il pas que le brouillon de la communication 2.0 pour les marques, une sorte d’essai au jardin d’Eden avant de se lancer dans le grand bain ?

Gregory Pouy a déjà croqué la pomme et s’est posé la question de savoir si les fan page de chez Facebook n’étaient pas en réalité une énorme erreur. Une réflexion qui « vole comme le papillon et pique comme l’abeille » et qui m’a inspiré cet article.

Des premiers pas contradictoires

Même si Google Plus enflamme la toile depuis quelques jours, il ne faut pas oublier qu’une grande partie des internautes le voyait déjà 6 pied sous terre il y a peu. Un intérêt entretenu par intraveineuse, impensable mais pourtant bien devenu réalité. 

Pourtant tout avait parfaitement démarré. Des articles dévoilant des fonctions en avant première, des photos volées et confessions de développeurs, tout était réuni pour faire grandir « l’envie d’avoir envie ». Des débuts fracassants donc, mais qui a au final engendré un élan stérile. Comment ?

>> Déjà il faut restituer le contexte. Google a beau régner en maître sur les moteurs de recherche (91% du marché) et s’être constitué un écosystème riche et usuel, il a également connu des échecs retentissants. On dit souvent que pour réussir il faut faire des erreurs et Google de déroge pas à la règle. Google buzz et Google wave avaient été annoncé comme des musts, il n’en a rien été. Preuve que même les plus grands cowboys peuvent se faire désarçonner par cette monture capricieuse qu’est le web social.

>> Au delà de sa propre personne, Google semble avant tout s’imposer comme le petit frère de Facebook au yeux des internautes, et on sait que la rivalité fraternelle est un modèle qui fait jazzer. C’est le prix à payer pour une couverture médiatique (trop) imposante, toujours désireuse de trouver à Facebook un concurrent pour le détrôner, un « Facebook killer » comme ils disent… Du coup dans la plupart des esprits, Google n’a rien inventé avec ce nouveau réseau social et c’est contenté de s’approprier tous les ingrédients de la recette idéale. Ils ont, comme les Romains en leur temps, su agréger toutes les bonnes idées et usages pour obtenir sur le papier le produit parfait. Mais nous sommes en 2011 et plus au temps de la mythologie. Résultat, un gâteau appétissant mais un goût amer de déjà vu. Vous l’aurez compris la plupart des internautes perçoivent Google Plus sous un modèle d’imitation et de mimétisme ; un Facebook bis.

 >> Outre des inquiétudes pendant sa gestation et des défaillances post-natal, le vrai problème de Google Plus est qu’il demande aux internautes de se rallier à sa cause, ce qui implique au mieux une infidélité à Facebook, au pire un choix à faire entre les deux. Mais une chose est claire, les internautes n’utiliseront pas deux plateformes sociales en simultané. À l’inverse, ils n’aiment pas non plus briser leurs habitudes et devoir se reconstruire un réseau de contacts ailleurs. En somme, repartir de zéro semble être un coût trop important.

 ==> Pour le moment ce bébé « Made In » Google peine encore à exister par lui même. Pourtant on peut penser que ce sont les précurseurs qui font l’histoire, mais sur le web, c’est à celui qui trouve en premier la formule magique pour séduire un maximum de convives et ainsi espérer déclencher le mécanisme du bouche à oreille. Sur ce terrain, on peut dire que Facebook est déjà passé par là. Mais a-t-on raison de mettre ces deux monstres sacrés sur le même terrain ? 

Une crédibilité professionnelle dont ne dispose pas facebook ?

Qu’on se le dise, Facebook s’est imposé pour les marques par défaut et non par logique. C’est un essai, une béquille de soutien pour amorcer une dynamique d’échanges horizontaux encore balbutiante. Évidemment j’entends déjà certains fans d’Oasis et de Starbuck qui me diront que pas du tout, cela fonctionne, et que des marques prospèrent sur ce support. Oui mais quelles sont ces entreprises ? Des grandes enseignes disposant d’un capital sympathie et émotionnelle ou bénéficiant de budgets colossaux et de communications télévisuelles pour la plupart. N’oublions pas que la grande majorité des entreprises sont des PME et TPE. Qu’en est-il pour eux ? 

>> Les marques ont techniquement plus de chances d’être à l’aise avec Google Plus car il est parfaitement intégré à un ensemble d’outils et de plateformes souvent utilisés par les professionnels. Un esprit sain dans un corps sain si on veut. Les marques ayant fièrement réalisé leurs galons d’essais sur Facebook auront sans doute plus d’assurance et moins d’appréhension à se lancer sur Google Plus. A contrario, la suprématie des fans page résultent surtout d’un effet d’appétence des marques face à une communauté toujours plus conséquente et à une main tendue de Facebook pour les aguicher. Dans ce contexte, les professionnels du web ont joué le jeu en clamant haut et fort que les fan page étaient l’avenir de la communication 2.0. Un effet boule de neige qui a donné tout naturellement à Facebook une certaine légitimité.

 >> Pourtant, il faut bien saisir que Facebook est par nature un support pour les échanges informels. Il y a un méli-mélo permanant et total entre vie perso/pro, ce qui fait qu’il faut jongler avec ses deux vies dans notre fil d’actualité. L’utopie d’un seul site « multidentitaire » est un pari presque réussi par Mark Zuckerberg qui est parvenu par la force des choses à créer un environnement équipé du gouvernail de notre vie sociale. Dans cette apparente illusion de contrôle, les marques ont cependant mis du temps à vouloir prendre la parole dans cette salle de concert immense, inconnue et intimidante. Preuve que l’environnement n’était à la base pas adapté à cette cohabitation.

>> Google Plus de son côté dispose d’outils inédits et surtout pratiques comme son système de visioconférence intégré. Une palette de fonctionnalités qui peuvent également convenir pour un travail collaboratif en interne. Par ce biais il pourrait devenir un RSE (Réseau Social d’Entreprise) en puissance pour certaines sociétés. Mais c’est surtout pas son système de cercles que le réseau tente de se forger une identité. Dommage que cette approche reflète plus l’écho des soucis de Facebook avec les informations privés. Finalement ce qui semble avoir fait ses preuves est le bouton +1 qui commence à prendre de l’ampleur grâce à son accessibilité sur les moteurs de recherche. Une valeur ajoutée sur les résultats obtenus et un moyen de créer du viral pour un lien en le partageant à son réseau.

>> Mais la plus grande force de Google Plus est surtout de n’être pas une fin en soi. Le réseau social n’est que le verni visible de la couche sociale à disposition de l’internaute. En effet si Facebook doit en partie sa suprématie à ses nombreux partenariats qui ont su le transformer en carrefour virtuel, Google Plus n’impose pas de rester sur son url mais propose un fil directeur continu à travers les plateformes de sa généalogie : Youtube, Gmail, agenda… L’annonce du lifting de Youtube à la sauce Google Plus souligne bien cette stratégie d’intégrer une homogénéité permanente entre les plateformes Google. Cette présence maintenue à travers différents sites peut donner un sentiment de liberté quand Facebook semble parfois nous étouffer.

 ==> En ce sens la maison google est sans doute plus rassurante pour les annonceurs que celle de M. Zuckerberg car plus familière. Elle dispose surtout d’un environnement homogène avec des voisins qui parlent à l’unisson, ce qui rassure l’internaute. Mais la force de Facebook (3ème pays le plus peuplé au monde) est sa renommée et ses habitants. C’est un refuge de masse qui permet aux marques de pouvoir espérer fédérer autour d’une « communication 2.0 ».

 Alors plus ou moins convaincu par le réseau de Google ?

Google Plus n’est pas Facebook et Facebook n’est pas Google Plus. Vouloir croire qu’ils sont frères ennemis est une erreur. Pourtant leur affrontement est bien frontal dans l’inconscient collectif.

On pense souvent (à tord) que la sortie d’une nouvelle plateforme induit forcement la disparition d’un autre déjà existante. Cette rivalité innée sort surtout de la bouche des professionnels du web qui se frottent les mains? Leurs articles informeront un lectorat un peu perdu mais engrangera surtout un maximum de partage. Du donnant donnant en soi… Pourtant ce passage de témoin s’opère rarement comme l’avaient prédis les tauliers du web. N’est pas Nostradamus ou Paco Rabanne qui veut !

Je pense que Google Plus a sa carte à jouer s’il joue à fond le jeu de la différenciation afin que les internautes coupent le cordon vituel d’avec son faux frère Facebook. L’annonce de la possibilité de créer une page corportate est une bouffée d’oxygène pour les annonceurs en quête de succès mais surtout pour la plateforme elle-même qui vivait déjà sous perfusions.

Même si Google dispose d’un réseau à fort potentiel, son succès et son enracinement dans les usages des consonautes dépendra d’une multitude de facteurs contextuels. Si la mayonnaise prend réellement, il faudra un certain temps afin que les clients et prospects puissent changer leurs habitudes et quitter le monstre Facebook. Pourtant avec le nombres de plateformes ultra fréquentées à leur disposition, Google a en main un réseau social pouvant servir de pierre angulaire pour fluidifier le tout.

Outre les outils et les fonctionnalités déjà disponibles ou à venir, Google doit avant tout se concentrer sur l’intéropérabilité de Google Plus dans la couche sociale existante pour se forger une personnalité  consistante et convaincre les internautes. C’est pas ce biais seulement que les utilisateurs pourront y trouver une réelle valeur ajoutée et s’y projeter au quotidien.

 Je terminerai par cette présentation d’Axel Aigret qui anime un site uniquement dédié à Google Plus.

 

Sources images :

http://www.nichewp.com/wp-content/uploads/2011/07/I-Was-on-Google-Plus.jpg
http://walls.themespsp.fr/wp-content/uploads/2011/10/Google%20Plus_20.jpg
http://crudefutures.typepad.com/crude_futures/files/300px-Magritte_TheSonOfMan.jpg
http://static6.businessinsider.com/image/4ecc059a69beddd367000011-400-300/new-youtube-20.png
http://ibuzzyou.fr/wp-content/uploads/nouveau-youtube-425×212.png

A propos de l'auteur

Ronan Boussicaud

Ronan Boussicaud  (18 articles)

Community manager / webmarketeur au sein de l'agence Useweb, je développe des analyses mêlant web 2.0 et psychologie sur mon blog « La Psyché du Web social » et participe à des ouvrages numériques collaboratifs. Je rédige aussi des articles sur des sites spécialisés (comme My Community Manager Webmarketing&Com) et anime régulièrement des conférences autour du community management et des médias sociaux. En octobre 2012, j'ai publié un ouvrage co-écrit intitulé "Tout savoir sur... La marque face aux bad buzz : anticiper et gérer les crises sur les médias sociaux" aux éditions Kawa. Grand curieux et cinéphile dans l'âme, le web social me colle à la peau. Passionné par le web communautaire mais aussi par toutes les formes de communication humaines, je crois profondément au relationnel et à l'échange. Alors, pourquoi ne pas vous joindre à nous ?

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